Ici tout va bien
Je reviens plus tôt de Nancy.
Parce que le moral est très mauvais, et je commence à comprendre ce que c'est de s'assumer.
Je n'ai pas envie de raconter ma vie.
Je
sais pas, je suis bizarre, je me sens vide, tout en étant pleine, vide
de sens, pleine de connaissances, ce genre de choses qui peuvent énerver
le monde.
Je pense que je vais balancer tout ce que j'ai dans la tête.
Je
ne suis pas issue d'une famille où on fait des études. Pour
l'homme/jeune homme qui m'a conseillée d'aller dans un bar pour me
méler à la populasse, je lui réponds gentiment, que je n'ai pas
besoin. J'ai les remarques de mes parents, la vie de tous les jours,
et surtout surtout les gens de l'amphi. Vous ne pouvez pas savoir ce
qu'on peut entendre en Fac de Droit. Je veux dire que je dénigre pas
toutes les personnes qui sont en Droit, ou même dans un amphi, mais je
me rends compte, que parfois, c'est un peu le pot pourri. Il y a des
filles qui sont là pour rencontrer un futur juriste qui lui permettra
d'avoir un mari avec un bon salaire tandis qu'elle fera bobonne dans
son salon. Bon, je sais, cela parait réducteur, élitiste, etc, mais en
ce moment, j'ai une haine incroyable pour les remarques débiles que
j'entends derrière moi. Comme cette fille qui se moque de notre prof
d'Intro Droit, alors que elle, elle a deux mois de Droit et que la prof
a au moins plus de dix ans. Je veux dire par là que j'ai l'impression
qu'il y a de moins en moins de respect envers les gens qui ont vraiment
travaillé leur matière. On a tous une spécialisation, mais bordel, faut
arrêter à notre âge de se foutre de la gueule des profs. Y'a rien de
pire, je trouve. On est des petits cons en première année, alors autant
se la fermer.
Oui donc, je reprends ma première idée.
Pour ceux qui auraient cru que j'étais devenue une bourgeoise de Prépa Science Po'. Loupé.
Je
n'ai pas eu de contexte familiale qui m'ont aidée vraiment à développer
mon côté réflexion intense. Je vis dans un HLM, j'ai un bon complexe du
pauvre régulièrement, je n'ai jamais eu tout ce que je voulais, mais je
n'ai manqué de rien. Alors, oui, en ce moment, j'ai vraiment du mal,
parce que dans ma prépa, ce sont leurs parents qui leur ont payer leur
prépa, ils font des "rallyes" (pour ceux qui ne comprennent pas, je
vais vous expliquer simplement mais pas par une image péjorative : une
fête où tout le monde est très bien habillé et où on danse très bien,
et où on évite de dégueuler sur les autres ), ils ont fait les JMJ, les
vacances au sky c'est obligatoire, je ne parle pas des fringues, des
téléphones portables, etc.
Mais vous savez quoi? Ils sont même sympas.
Alors
en ce moment, je me sens tirailler entre mon milieu d'origine et ma vie
nancéenne. Nous, la famille de Gauche, ancrée à Gauche, qui a pleuré
pour la mort de Tonton,, et bien la dernière est en train de virer
bizarrement.
Elle ne sait plus où elle en est Paradoxa.
Elle ne
sait plus où la véritée se trouve, qui a raison, tort, par quelle
lunette il faut regarder le Monde. parce que, Public adoré, le Monde,
on le voit pas tous de la même manière.
J'ai l'impression d'être une mosaïque.
J'ai
connu des gens dans une très grande misère, pour qui j'ai beaucoup
donné, j'ai connu des gens dans la drogue, dans la déchéance mentale,
j'ai connu des gens aux revenus moyens, mais qui en profitait, j'ai
connu une mini bourgeoisie dans une mini ville et là, je connais, le
monde influençable des intellectuels et et des chrétiens de droite.
J'ai
du mal à me retrouver dans tout cela et ma conscience politique ou même
morale prend des coup de massues à Nancy, des trucs qui me font
halluciner.
Par exemple, un de mes amis de prépa a été étonné que j'avais déjà travaillé. Que dire ? Que dire ? Que dire ?
Alors, je ne sais pas trop, je me perds.
A Nancy, je n'ai plus de racines, je n'ai plus de passé et cela me manque. Une base pour me rappeler qui je suis, d'où je viens.
Et
pis il y a les caisses en cours. 2.5 de moyenne en Allemand c'est
remarquable. Alors, je ne veux plus passer mes concours, je ne veux
plus aller à Science Po', je ne veux plus monter dans la socièté parce
qu'on ne m'a jamais préparée à entendre parler de choses qui pour moi
n'existait. On peut concevoir la misère, les gens y sont parfois
gentils. Mais on a du mal dans la richesse. On m'a appris que les
riches étaient des gens hautains, avec des goûts bizarres. Et je me
rends compte que oui, ils disent parfois des choses révoltantes, que
oui ils ont parfois de la merde dans les yeux, mais ils sont sympas.
Ils sont différents, mes collègues de Droite de Prépa.
Alors, j'ai l'impression d'être une merde. Une merde que d'avoir vécu dans des préjugés.
Je
ne me sens pas riche d'apprentissage, je me sens perdue, je me sens
incapable de rien, et je pense que je ne fais pas ce que je veux.
Ah la solitude, parlons en.
Je suis Miss Solitude 2005.
Je
pleure tout le temps, je n'arrive pas à me faire à ma nouvelle vie,
j'ai l'impression d'être abandonnée, que tous ceux que j'aime sont à au
moins deux heures de train. Je n'en peux plus de ne plus avoir le temps
de boire un thé, d'écouter de la musique rien que pour l'écouter,
courir dans la rue sans but et non pour aller en cours.
Partir le
matin, il fait nuit, revenir le soir , il fait nuit, travailler entre
midi et deux, connaître par coeur les bâtiments, les murs, les pierres,
les places, et le Resto U'. Je ne parle même plus de la B.U.
Je me dis que c'est ainsi, que je l'ai choisi, que donc, je ne devrais pas me plaindre.
Mais non, cela revient, encore plus lancinant.
Et puis savoir qu'on est une inconnue, qu'on recommence une vie...
Et les amours qui semblent si lointains et si proches en même temps.
J'aimerais m'étendre dans un champ
d'herbes fraîches et me dire que personne ne m'attend, que je n'aurais
rien à faire pour demain.
J'aimerais prendre mon temps et ne pas me
dire que les vacances de Noël sont foutues à cause de mes partiels et
mon besoin de perfection permanente.
J'aimerais me dire que quelqu'un m'attend quelque part, que je peux partir comme et où je veux.
Cette liberté que finalement je n'ai jamais eu.
Ma contrainte, c'est moi-même.
J'ai les boules.
Et c'est même pas de pétanque.